• Sur tout le Tapis règne la paix de l'empire dumii. Aux marges de la civilisation, la tribu des Munrungues coule sous les poils une existence paisible. Mais, un jour, un terrible cataclysme frappe à proximité du village munrungue. Une ville dumiie est broyée par l'ancien monstre des légendes : le grand Découdre est de retour ! Dans son sillage, des créatures féroces montées sur des fauves parachèvent son œuvre de destruction. Cernés, les Munrungues s'engagent dans un grand périple à travers les poils, sous la conduite des frères Orkson. Un voyage qui les conduira à la découverte des merveilles de leur monde, et qui changera pour toujours l'existence de tous les Fils de la poussière.


    Le peuple du tapis / Terry Pratchett


    Bon, autant avouer la vérité maintenant - et peut-être qu'en le disant très vite les fans ne vont pas m'entendre et donc éviter de me lyncher sur place - mais je n'ai jamais lu un seul livre de Terry Pratchett à part celui-ci. Voilà, on peut passer à autre chose maintenant ?

    J'ai lu Le Peuple du Tapis toute jeune, et j'en ai pleuré de rire. Et c'est toujours avec délectation que je me replonge dans ce court roman. Outre l'originalité de placer son histoire en plein cœur d'un tapis, Terry Pratchett le peuple de créatures toutes plus originales les unes que les autres : les Moizes et leurs sinistres snargues, les Vivants qui connaissent l'avenir, les minuscules Fulgurognes toujours prêts pour une bonne bagarre...
    Au milieu de ces différents peuples, Snibril et son frère Glurk, et toute la tribu des Munrungues derrière eux, vont par la force des choses quitter leur village détruit par le Grand Découdre et découvrir le vaste monde, faire des rencontres toutes plus étonnantes les unes que les autres... et changer le destin du Tapis tout entier...

    - Nous avons besoin d'aide, insista Snibril avec un chuchotement paniqué. C'est quoi, le grand Découdre ? Où pouvons-nous aller pour être en sécurité ? Vous ne pourriez pas nous le dire ?
    Le Vivant se pencha plus près de lui.
    - Est-ce que vous êtes capable de garder un secret ? demanda-t-il sur le ton de la conspiration.
    - Oui !
    Mais de le garder vraiment bien ? Même si vous aviez envie de donner n'importe quoi pour pouvoir le confier à autrui ? Même si c'était aussi douloureux que de garder en vous une braise rougeoyante ? En êtes-vous vraiment capable ?
    - Euh... oui.
    - Eh bien, conclut le Vivant en se redressant sur son séant, nous aussi.

    L'histoire tourne essentiellement autours de Snibril. On peut regretter le fait qu'il ait un caractère un peu trop effacé, mais cela est vite oublié grâce à la brochette de personnages hauts en couleurs qui l'entourent : Forficule le philosophe cynique, Fléau l'ancien soldat droit dans ses bottes, Brocando le petit roi fulgurone impulsif... Malgré leurs caractères différents, ils s'unissent pour enrayer l'invasion des moizes et l'anéantissement de la civilisation. Mais cela ne va pas sans heurts - et cela permet a Terry Pratchett de nous servir des moments croustillants d'humour, ainsi qu'une ode à la fraternité.

    Quand un grain de sucre devient un roc immense, une pièce de monnaie une région toute entière, un aspirateur le fléau ultime et un grain de poussière la colline où est bâtie une cité... Le monde vu à travers le prisme de l'infiniment petit fourmille d'originalité !

    Vous ne regarderez plus votre tapis de la même manière désormais !


    Le Peuple du Tapis
    Terry Pratchett
    Editions J'ai Lu
    5.80€

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  • Quelques peuples nomades tentent de subsister dans une Europe dévastée par les pollutions chimiques, nucléaires et génétiques. Parmi eux, le peuple de l'eau. Le seul à pouvoir localiser les sources épargnées par les contaminations. L'avenir de tous dépend des baguettes des sourciers. Et sans eau pure, pas de vie !
    Solman le boiteux est né avec le don de clairvoyance. infaillible juge des âmes, rejeté par les autres, le jeune homme ne peut se confier qu'à Raïma la guérisseuse. Elle l'aide à prendre conscience de son pouvoir, lui ouvre les yeux sur les signes qui jalonnent la route du peuple de l'eau.
    Des signes qui, à la lueur du Livre interdit, semblent annoncer la fin des derniers hommes...


    Les derniers hommes / Pierre Bordage



    il y a de cela maintenant un bon petit paquet d'années, les éditions Librio avaient eu la formidable idée de publier Les Derniers Hommes, un feuilleton de 6 courts romans, à raison d'une publication par mois - aujourd'hui réédité chez J'ai Lu et le Diable Vauvert. Je me souviens de l'impatience de ma sœur et moi, lors de la sortie de chaque tome...

    Pierre Bordage est un spécialiste des romans d'anticipation. On retrouve ici ses thèmes de prédilection : une Europe post-apocalyptique ravagée par la guerre, un humanisme sombre et désenchanté, et pourtant porteur d'espoir, quelque part. La foule de personnages qu'on croise pourrait presque inciter à se tirer directement une balle dans la tête - l'égoïsme, l'indifférence et la cruauté règnent en maître - mais ce sentiment est heureusement mis de côté grâce à la pureté de Solman, la gouaille de Chek et Moram, la ténacité de Raïma.

    La capacité de Solman a sonder l'âme des gens pour y détecter le moindre mensonge est un terrible fardeau pour lui. Son peuple l'évite, terrifié par cet étrange pouvoir. Et pourtant, c'est grâce à ce don que le jeune homme va contrer une mystérieuse menace...

    La vie des différents peuples nomades qui parcourent l'Europe est minutieusement décrite. Chaque clan a sa façon de vivre, ses coutumes et ses expressions. Bordage nous les présente de façon quasi anthropologique, et ses descriptions sont fascinantes. Ainsi , le peuple de Solman, les Aquariotes, se déplacent dans des camions maintes fois rafistolés pour chercher inlassablement de l'eau pure, leur monnaie d’échange lors des grands rassemblement avec les autres clans.

    Le contexte est aussi clairement expliqué - comment et pourquoi la guerre a ravagée le Vieux Continent, les machines à tuer qui continuent de fonctionner, et les maladie comme la transgénose que les armes bactériologiques ont engendrés.

    Porté par un mysticisme sous-jacent, le récit est mené tambour battant et forme un véritable plaidoyer pour la planète, un cri d'alarme contre les guerres, et donne l'envie de tendre la main à son prochain.


    Les derniers hommes
    pierre Bordage
    Editions Le Diable Vauvert
    23,50 €


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  • Quand Richard Matheson entre en littérature, le fantastique entre, lui, dans l'âge de la modernité : évacué, le surnaturel gothique, l'effroi désormais s'immisce dans les plus infimes recoins du quotidien, et ce avec un talent littéraire à nul autre pareil : d'une tranchante concision, d'une variété narrative et formelle exceptionnelle, d'une richesse thématique impressionnante, la "marque" Matheson fait naître une nouvelle vision de la terreur, névrotique, angoissante et délicieusement teintée d'humour macabre...


    Aujourd'hui je m'attaque à un monstre sacré de la littérature. Richard Matheson a inspiré nombres d'écrivains en tout genre - dont Stephen King - et reste un des maîtres absolus en matière de littérature fantastique. Le scénario de Duel, réalisé par Spielberg ? C'est lui. Je suis une légende ? C'est lui aussi. L'homme qui rétrécit ? Encore lui.

    Il y a quelques années, les éditions J'ai Lu ont eu la formidable idée de publier l'intégrale des nouvelles de Matheson. J'avais 19 ans, j'aimais déjà depuis longtemps les littératures de l'imaginaire. Fort logiquement, j'ai acheté cette intégrale en trois tomes. Je ne l'ai plus lâchée depuis. De temps en temps, je les ouvre pour lire une ou plusieurs nouvelles - voir le recueil entier.

    Il est difficile de parler des nouvelles de Matheson dans leur ensemble, tant elles sont éclectiques. On trouve de tout. Une tripotée de donzelles, où des prostituées font du porte à porte est extrêmement drôle ; quant à L'examen - les personnes les plus vieilles passent un examen, et ceux qui échouent sont purement et simplement euthanasiés, afin de limiter les problèmes de surpopulation - c'est une nouvelle dont l'on ressort la gorge nouée.
    Beaucoup de ces textes sont du domaine de la science fiction ou de l'anticipation - des histoires qui se passent sur d'autres planètes, ou présentant un futur ravagé et sans espoir. D'autres s'inscrivent dans le quotidien, où un élément fantastique vient gripper le quotidien bien huilé. Ce moment où le personnage central sent que son esprit lâche prise, cet instant où il se sent basculer vers la folie...


    L'écriture de Matheson est claire et magistrale. Dès la première phrase, le ton est donné, le décor planté, et on embarque irrésistiblement dans l'histoire. On sent qu'il maîtrise l'art de la nouvelle, et qu'il s'amuse beaucoup à concocter des chutes renversantes. Le thème central est toujours l'humain et sa relation face au monde ou à autrui.

    Trois livres magistraux, qui font rire, pleurer ou frissonner. Que vous aimiez ou non le fantastique et la science-fiction, ces textes se lisent d'une traite.


    Nouvelles
    1/ 1950-1953
    2/ 1953-1959
    3/1959-2003
    Richard Matheson
    Editions J'ai Lu


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  • Une journée d'octobre apparemment comme les autres, l'humanité découvre avec stupeur que la vitesse de rotation de la Terre a ralenti. Les jours atteignent progressivement 26, 28 puis 30 heures. La gravité est modifiée, les oiseaux, désorientés, s'écrasent, les marées se dérèglent et les baleines s'échouent... Tandis que certains cèdent à la panique, d'autres, au contraire, s'accrochent à leur routine, comme pour nier l'évidence que la fin du monde est imminente. En Californie, Julia est le témoin de ce bouleversement, de ses conséquences sur sa communauté et sa famille. Adolescente à fleur de peau, elle est à l'âge où son corps, son rapport aux autres et sa vision du monde changent : l'âge des miracles. Entre roman d'anticipation et roman d'apprentissage, L’Âge des miracles est un livre visionnaire sur la capacité d'adaptation de l'homme, poussée ici à son paroxysme.


    L'age des miracles / Karen Thompson Walker




    Julia, 23 ans, se rappelle son adolescence, et à travers elle, on suit le lent déclin de l'humanité. La rotation de la Terre a ralenti, et cet évènement entraîne de graves conséquences : les oiseaux meurent en premier, désorientés par un champ magnétique qui joue les girouettes, puis les baleines et d'autres animaux. La gravité se modifie - Julia constate ainsi qu'il est plus difficile de lancer loin un ballon de football. L'atmosphère ne protège plus des radiations du soleil, entraînant des maladies plus ou moins graves.
    Enfin, les jours et les nuits s'allongent, de plus en plus, jusqu'à chacun durer des semaines à la fin de l'histoire. Entre les nuits glaciales et les journées brûlantes, les bêtes et les plantes ont du mal à survivre, augurant d'une future famine. Quant aux humains, ils se partagent en deux groupes : ceux qui continuent de vivre au rythme des vingt-quatre heures des horloges, et ceux qui préfèrent suivre le rythme solaire.

    A travers les souvenirs de Julia, on suit un récit crépusculaire où l'extinction de l'humanité semble inéluctable ; les gens continuent leur vie tant bien que mal en espérant sans trop y croire que tout pourrait s'arranger. En attendant, ils accumulent les provisions et les objets nécessaires à la survie. Des mouvements de paniques gagnent sporadiquement les foules, des sectes voient le jour. Et Julia ? Julia vit sa première histoire d'amour, Julia espère encore vivre une adolescence normale...

    C'est un récit à la fois touchant et effrayant, une hypothèse d'apocalypse qui pourrait fort bien nous arriver et devant laquelle nous resterions impuissants, malgré toute notre science.


    L'âge des miracles
    Karen Thompson Walker
    Presses de la cité
    19.90 €


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  • Jadis synonyme de liberté et de progrès, l'Union n'est plus que l'ombre d'elle-même, minée par la corruption, les complots de toute sorte et l'incompétence notoire de ses dirigeants. Ces derniers n'ont aucune conscience des dangers qui les guettent : au nord, les clans barbares se rassemblent sous une bannière unique ; du sud, où les forces du Gorkhul étaient jusque-là tenues en respect par l'armée régulière, proviennent de bien curieuses rumeurs. Bayaz, le Premier des Mages, sort de sa retraite millénaire pour sauver ce qui peut encore l'être. Son plan inclus un barbare philosophe, un jeune officier écervelé, un navigateur volubile, une intrépide chasseresse, un apprenti dépressif et surtout une grosse, grosse colère...


    La première loi / Joe Abercrombie




    L'auteur pose ici une histoire assez classique - un groupe de personnages se mettant en quête d'un objet fantastique afin de sauver le monde - avec un style plutôt fluide : on suit les divers personnages en question au travers de chapitres consacrés à chacun d'entre eux. Les batailles sont épiques, et le récit ne manque pas d'humour. Cela pourrait donc être une série de fantasy passe-partout, agréable à lire, mais vite oubliée.

    Ce qui fait tout le génie de cette série sont ces personnages. On a droit à une brochette qui peut sembler convenue : le barbare, l'épéiste sémillant, le mage, la guerrière farouche... Mais voilà, l'auteur a eu la fabuleuse idée de détourner ces personnages-types. Voyez plutôt : Ferro la guerrière est une vraie sauvage qui pue ; Logen le barbare se révèle être un véritable philosophe entre deux transformations en berserker ; Jezal l'épéiste est un jeune homme tout ce qu'il y a de plus écervelé et égoïste... Le reste allant à l'avenant.

    Ils n'ont rien en commun, si ce n'est de se détester cordialement dès le premier regard, mais vont être réunis par Bayaz, mage mythique qui se met facilement en colère - en faisant tout exploser au passage... Un groupe haut en couleur, auquel on s'attache tout de suite (que j'aime cette cruche de Jezal !)

    Mais la palme revient à Glokta. Ancien bretteur adulé de tous, un séjour peu commode dans les prisons de l'ennemi l'ont transformé en infirme à la jambe folle, aux yeux larmoyants et qui ne peut avaler que des aliments liquides pour tout repas. La douleur est devenue une compagne omniprésente de sa vie - jamais la montée d'un escalier n'a semblé si douloureuse et pénible dans toute l'histoire de la littérature. Il est devenu Inquisiteur, faisant de la torture un exercice de haute voltige. Quand il est sur une affaire, il ne la lâche pas, dût-il torturer tout ce qui lui tombe sous la main pour cela. Il est - malgré tout - droit et incorruptible. Il manie en outre à merveille le cynisme et l'auto-dérision.
    Mhm ? Oui oui, c'est bien mon personnage préféré. Vous pensez bien : un salaud qui se salit les mains et qui fait de l'humour noir dans les pires situations... Je fonds immédiatement !

    L'histoire est traitée sans manichéisme - les salauds s'en sortent souvent mieux que les héros, qui ne sont eux-même pas exempts de défauts. Adua la cité du Sud semble bien corrompue face aux hommes du Nord, plus brutaux mais bien plus francs. Ajoutez à cela d'étranges créatures comme les Dévoreurs et les Têtes Plates, et vous obtenez un beau bordel !

    Je ne sais pas si j'arriverai à attendre la sortie en poche du troisième tome...


    La Première Loi
    1/Le premier sang - 9,40€
    2/Déraisons et sentiments - 9,60€
    Joe Abercrombie
    Edition J'ai Lu


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